Trek autour de la vallée de Yosemite

Yosemite, c’est un endroit présent dans l’imaginaire collectif. D’immenses falaises d’un seul tenant connues pour l’escalade, des séquoias titanesques, des ours un peu partout : l’expression d’une nature puissante et unique. Le site est l’un des premiers parcs nationaux américains. Il a été rendu célèbre par l’infatigable John Muir (1838-1914) qui très souvent allait bivouaquer dans ces montagnes. Je vous propose sur cette page un récit de mon trek à Yosemite en 2015, une randonnée itinérante de plusieurs jours en portant nourriture et tente.

Mon expérience de trek dans Yosemite m’a révélé d’autres aspects de ce parc moins connus du grand public : l’amour des Américains pour les feux de camp en soirée, des écureuils pas farouches un peu partout, des pommes de pin de cèdre monstrueuses, ou encore l’art et la manière de cacher sa nourriture à l’abri des ours. Cet article de blog s’adresse à tous ceux qui sont curieux de découvrir le parc de Yosemite dans un récit à la première personne, ou à ceux qui rêvent un peu d’autres horizons. Il sera aussi utile pour tous ceux qui prévoient un long trek dans cette vallée mythique : en plus de ma trace GPX, je vous fournirai tous les renseignements utiles pour préparer ce trek.

Préparer son trek longue distance dans la vallée de Yosemite

Si vous êtes intéressés par cet itinéraire de randonnée longue distance en tente, je peux vous donner quelques conseils pour le réaliser. L’accès au parc depuis la ville de San Francisco (grand aéroport le plus proche) peut se faire par une combinaison de train et de bus qui vous prendra un jour de voyage environ.

Conseils spécifiques pour un trek au parc de Yosemite

Permis de camper

Pour pouvoir camper dans le parc, il faut obtenir un “wilderness permit”. Des explications détaillées en anglais sont disponibles à cette page. Grosso modo, la situation en 2015 était la suivante (cela pourrait avoir changé depuis lors) : chaque départ de randonnée dispose d’un certain nombre de permis qui sont distribués régulièrement tout au long de l’année selon des règles absconses qui sont expliquées sur leur site. Si vous ne trouvez pas de permis pour le départ que vous convoitez, regardez pour d’autres départ notamment les plus lointains qui ont plus de disponibilités. Vous devez effectuer votre réservation très en avance pour être sûr d’avoir un permis.

Une fois le permis obtenu, votre première nuit en tente doit s’effectuer proche du point de départ. Après cela, vous pouvez randonner et camper librement dans tout le parc. J’ai croisé un ranger lors de mon parcours qui a contrôlé mon permis tôt le matin. Donc il vaut mieux tout faire dans les règles.

Bear canister

Là où le système des permis est bien foutu, c’est que vous devez d’abord passer au wilderness center pour prendre votre permis. On vous donnera alors de nombreuses informations sur les treks dans Yosemite, et notamment comment se comporter face aux ours.

On vous louera aussi un bear canister, une sorte de grosse boîte bien lourde en plastique qui sert à mettre votre nourriture à l’abri des ours. Chaque soir, mangez loin de votre tente et mettez la nourriture à l’abri dans le bear canister. Si un ours passe, il tentera d’ouvrir la boîte en tapant dessus mais n’y arrivera pas. C’est beaucoup mieux que s’il tentait d’ouvrir votre tente en tapant dessus ! Les ours n’agressent pas les humains sauf si ils s’habituent à leur voler de la nourriture, c’est pourquoi il faut être très prudent et ne rien leur laisser. Ce bear canister m’a personnellement été très utile, lisez donc mon récit pour vous en rendre compte !

Conseils généraux pour la randonnée en bivouac

À part cela, randonner en tente à Yosemite n’a rien de très différent par rapport à la randonnée dans d’autres parties du monde. Jetez donc un oeil à ma section grand itinéraires pour d’autres descriptions de treks longue distance. La randonnée en itinérant est parfaite pour Yosemite car vous n’y trouverez pas de refuge ou autre structure d’accueil ailleurs que dans le fond de vallée. C’est l’avantage des parcs nationaux américains : nature équivaut à protection totale, on n’est pas dans certains parcs français que je ne nommerai pas où le bivouac est interdit mais les refuges et stations de skis autorisées…

Matériel conseillé pour un trek à Yosemite

Randonner en autonomie complète n’est pas forcément synonyme d’un sac hors gabarit, le matériel de trek ayant suivi une belle évolution pour le rendre accessible et léger ces dernières années. Si vous cherchez une tente transportable sans vider votre portefeuille, jetez un oeil aux nouvelles tentes deux places de Décathlon. D’accord, on peut faire mieux que 2.9kg pour 2 personnes, mais pas à ce prix. Et leur tente est spacieuse et bien imperméabilisée.

Côté duvet, je vous conseille un sac de couchage 0 degrés, car il peut faire froid la nuit en hauteur à Yosemite. Évidemment c’est agréable d’avoir un réchaud de camping afin de cuisiner des pâtes à cuisson rapide et autres délices culinaires en soirée. On trouve des cours d’eau probablement potable assez régulièrement le long du chemin. Si toutefois vous voulez être sûrs, vous pouvez partir avec un filtre à eau. Partez avec un minimum de vêtements et lavez-les à l’eau (sans savon !) le long du chemin. Pas besoin de plus de une paire de chaque type de vêtement (on met l’un, on lave et sèche l’autre sur le sac à dos). En tout, je réussis à partir avec environ 10-13kg tout compris dans mon sac à dos 50L. Plus lourd que pour de la randonnée en refuge, mais ce n’est pas la mer à boire.

Le récit de ma randonnée itinérante à Yosemite

Ce récit ayant été écrit plusieurs années après mon trek à Yosemite, veuillez excuser par avance toute imprécision dans la description des lieux ou le pointage GPX (non relevé sur le terrain mais effectué manuellement). Par ailleurs je m’excuse aussi de la qualité médiocre des photos : je les ai prises avant de changer mon matériel. Vous pouvez consulter ma section photographies pour d’autres photos de montagne de bien meilleure qualité ;).

Jour 1 : Premier contact avec Yosemite

  + 400 m / – 50 m       6 km

Rencontre avec les rangers

Me voilà donc, après un interminable voyage en train et en bus, aux portes du parc de Yosemite. Mon plan est de faire un tour complet de la vallée, Nord et Sud, en cinq jours avec ma tente. Le bus me laisse dans Yosemite Village et je vais récupérer mon permis chez les rangers. On me loue un bear canister (voir description plus haut) à laisser loin de la tente la nuit et on me dit : “Si tu entends un ours essayer d’ouvrir ta boîte la nuit, tu sors de ta tente et tu fais du bruit. Ils sont peureux, ils vont fuir”. Très bien, je pense. Sans que me vienne une seconde à l’esprit que j’aurai réellement à mettre ce conseil en application dans ma randonnée… Les ours sont vraiment nombreux à Yosemite, on en croise régulièrement !

Je traîne un peu dans le fond de vallée. C’est amusant, il y a des écureuils gris pas peureux un peu partout. C’est étrange de les voir aussi peu farouches par rapport à notre écureuil roux européen ! Je remarque aussi la taille des pommes de pin des cèdres, qui sont énormes. Je prends ensuite un bus qui m’amène au départ de ma randonnée, au trailhead “Big Oak Flat Road” où j’ai réservé mon permis de camper. Une grosse pluie tombe pendant que je suis dans le bus. C’est plutôt bien calculé : je commence à marcher directement après l’orage.

Premier bivouac

Je suis un beau chemin qui monte dans la forêt sur les hauteurs de Yosemite. Dès le départ, les points de vue spectaculaires sur la vallée s’enchaînent. Notamment sur le mythique Half Dome, une montagne qu’on dirait coupée en deux par un géant, si caractéristique de cette vallée. Pour cette toute première étape, je randonne avec un ami de passage qui ne peut se permettre qu’un trek d’un jour à Yosemite. Nous nous sommes retrouvés par miracle à la sortie du bus, après avoir fixé un rendez-vous par email une semaine auparavant et sans aucun usage du téléphone !

Nous plantons la tente sur un petit replat au fond d’une vallée tranquille et boisée. L’eau coule à proximité, c’est parfait pour l’approvisionnement. Nous ne sommes pas seuls au campement et nos voisins ont fait un feu de bois. On discute et l’on célèbre la nature autour de cette délicieuse odeur de cèdre en train de brûler qui restera pour moi l’odeur même de Yosemite. En fait, les américains adorent faire des feux le soir et la législation les y autorise dans les endroits prévus à cet effet (un foyer en pierre), contrairement à la plupart de nos parcs en Europe. C’est une tradition très agréable qui nous permet de passer de belles soirées.

Nos voisins nous apprennent aussi qu’il vaut mieux manger loin de sa tente. Le ranger m’avait seulement dit de stocker le bear canister à bonne distance de la tente. Mais tout ce qui peut sentir la nourriture est potentiellement dangereux…

Jour 2 : El Capitan et Yosemite falls

  + 1350 m / – 1050 m       23 km

Pour commencer ma journée, je suis un sentier qui arrive dans un paysage de plus en plus rocheux au fur et à mesure de la montée. En chemin, je croise très tôt un ranger qui vérifie mon permis de camper et mon bear canister. Je vois peu de séquoias mais beaucoup de cèdres, avec un beau lichen jaune particulièrement abondant sur le tronc.

La montée culmine par l’arrivée au sommet du légendaire El Capitan. Cette montagne a été rendue célèbre par les ascensions en free solo de Alex Honnold. Pour ma part pas de folies, le sommet lui-même est bien plat et facile d’accès de ce côté. Je reste un long moment à contempler ce panorama splendide sur la vallée, il n’y a personne à cette heure matinale.

Mon chemin passe ensuite par Eagle Peak, un sommet avec un panorama comparable. Puis je redescends sur la rivière Yosemite Creek. Je rencontre la foule venue de la vallée par un chemin plus direct. Tout le monde se baigne dans les grandes flaques d’eau qui semblent prévues pour cela. J’en profite pour faire un plongeon moi aussi.

Juste à côté je peux admirer les Yosemite Falls du dessus. La rivière se jette dans le vide d’une hauteur vertigineuse. Un sentier bien aménagé permet d’accéder au panorama.

Après avoir bien lézardé au soleil près du torrent, je reprend ma marche en fin de journée. Je parcours encore un peu la jolie forêt de Yosemite, entre rochers de granit et troncs immenses. Puis je trouve un lieu de bivouac sommaire en milieu de forêt. Le soir, j’aperçois un cerf femelle non loin de là.

Jour 3 : Indian Arch et une nuit mouvementée

  + 400 m / – 500 m       11 km

Indian Arch

Au matin, je passe près du North dome, une crête rocheuse et plate quasiment sans aucune végétation. Le paysage est toujours aussi splendide, surtout que je me rapproche du Half Dome qui me présente sa majestueuse face d’un seul tenant.

Je continue mon trek à Yosemite dans un paysage lunaire et désertique. Quel changement par rapport aux sous-bois de la veille ! Plus loin m’attend l’Indian Arch, une arche naturelle de granite. Je ne sais pas trop pourquoi on la qualifie d’indienne… Toujours personne dans les parages, le seul endroit plein de touristes étaient les Yosemite Falls de par leur facilité d’accès. C’est bien d’avoir un parc où le seul moyen d’accès est le camping, ça limite très fortement le tourisme de masse !

Je continue dans ce paysage unique mêlant cônifères et étendues de granit. Plus loin, je tombe encore une fois sur une magnifique rivière avec des trous d’eau qu’on dirait aménagés pour la baignade. Cette fois-ci il n’y a plus personne ! Je me baigne avec délice.

Un peu plus loin, je me trouve face à un lieu de bivouac si idéal que je ne peux que m’arrêter là, même s’il est encore tôt. Non loin de la rivière, il y a une sorte de balcon rocheux qui domine la vallée juste en face du Half Dome. Je me délecte du soleil couchant sur les parois granitiques au soir, encore une fois je suis seul au monde. Personne d’autre que moi ne campe dans les environs. C’est décidément mon plus beau lieu de bivouac dans mon trek à Yosemite.

Ours nocturne

Toutefois, au début de la nuit, une mauvaise surprise m’attend. Je viens à peine de m’assoupir et suis dans les brumes étranges de la semi-conscience lorsque je m’aperçois que j’entends un drôle de bruit. Mon cerveau ralenti réalise alors ce qui se passe : un ours est en train d’essayer d’ouvrir la boîte à ours que j’ai laissée à quelque distance de ma tente ! Panique générale à bord, pour le coup je suis bien réveillé.

Je repense alors aux paroles du ranger qui me disait de sortir de la tente et faire du bruit. Quelle bonne blague ! “Jamais de la vie, je vais rester là-dedans sans faire de bruit”, je pense alors. Je serre les fesses en écoutant l’ours faire rouler la boîte dans tous les sens. Finalement, plus rien, il semble s’être éloigné. J’ose à peine bouger un orteil dans mon sac de couchage. La fatigue aura raison de moi et je sombre finalement dans le sommeil.

Jour 4 : Retour en vallée et passage en balcon sud

  + 1000 m / – 1200 m       19 km

Au matin, j’ai évidemment du mal à retrouver ma boîte, que l’ours a fait valdinguer quelque part. Je finis quand même par remettre la main dessus, mon petit-déjeuner est sauvé ! À l’aube, un sentier bien tracé me ramène en fond de vallée. Je pourrais arrêter là mon trek à Yosemite mais il me reste un jour et j’aimerais bien explorer le sud de la vallée.

Je rejoins donc Yosemite Village en passant à côté de jolis marécage et de rivières sablonneuses au milieu des pins. Le temps de refaire quelques courses à la supérette, et je prends un bus qui m’amène à un point de départ pour monter le versant sud de Yosemite. J’ai une bonne montée bavante qui m’attend dans l’après-midi pour rejoindre le plateau sud qui domine la vallée après presque 1000m de dénivelé.

Les panoramas magnifiques s’enchaînent. Cette fois-ci, je fais face à El Capitan dont je peux admirer la paroi d’un seul tenant. Je retrouve des coins de forêt verdoyante et (tiens donc !) une rivière idéale pour la baignade non loin d’un spot de bivouac. Je m’y arrête pour la soirée et fais un petit feu de cèdre en hommage aux traditions américaines pour fêter ma dernière nuit dans la nature à Yosemite.

Jour 5 : rencontre avec les oursons

  + 400 m / – 1250 m       16 km

Ours diurne

Je continue en forêt le matin. Le point de vue de Taft Point sur El Capitan dans la lumière matinale est bluffant. Je me dirige ensuite vers un panorama très connu à Yosemite, Glacier Point. Une route y mène donc j’y serai probablement beaucoup moins tranquille… C’est du moins ce que je crois.

En effet, je fais une rencontre surprenante le long du chemin. Plongé dans mes pensées, j’avance mais un bruit étrange me fait lever la tête. Coup au coeur : il y a un ours à une dizaine de mètres de moi ! Je vois quelque chose filer dans un arbre du coin de l’oeil mais je n’y prête pas attention. Il grogne un peu, je recule très lentement en le gardant à vue d’oeil. Lorsque je me suis éloigné un peu, l’ours redevient silencieux. Nous nous observons mutuellement, aussi curieux l’un que l’autre. Il ne semble pas du tout agressif, j’en profite pour prendre quelques photos.

Finalement, je met en pratique le conseil du ranger et fais du bruit en frappant dans mes mains. Efficace : l’ours fait demi-tour et s’enfuit immédiatement. Ce qui était dans les arbres descend et je réalise alors mon erreur : ce n’est pas un ours, mais une ours accompagnée de ses petits ! Très habiles, ils n’ont aucun mal à descendre de leur cachette et suivre leur maman. Je prends une dernière photo inoubliable de la maman ours avec ses deux petits devant les parois rocheuses de Yosemite. Quel dommage que je n’aie pas encore eu de matériel photo de meilleure qualité avec moi lors de ce trek à Yosemite…

Retour en vallée

Cela me semble le plus bel adieu que la vallée de Yosemite puisse me faire. Après cela, la vue de Glacier Point semble presque décevante, même si on ne se lasse pas de la vue du Half Dome. Je peux aussi admirer la Yosemite Fall de l’autre côté.

Pour redescendre dans la vallée, je prends un sentier bien aménagé dénommé “four-mile trail”. Il semble être assez connu dans le coin puisqu’il fait 1000m de dénivelé en 4 miles, même si je ne vois pas ce que cela a de si extraordinaire. C’est toutefois un vrai plaisir de redescendre sur ce beau chemin. Et voilà, je rejoins finalement le fond de vallée pour prendre le bus pour mon retour.

Conclusion : mon expérience de trek à Yosemite

Mon tour de la vallée de Yosemite en itinérance m’aura laissé des souvenirs impérissables. Ce trek restera gravé dans ma mémoire pour le contact direct avec la nature que l’on peut vivre dans ce parc, bien plus vibrant que dans nos parcs européens. Mon itinéraire passant à la fois au nord et au sud de la vallée m’a permis d’admirer tous les plus beaux points de vue sur ces falaises mondialement connues.

Je recommande donc ce trek à quiconque veut découvrir le parc de Yosemite en restant aussi proche de la nature que possible. N’hésitez pas à commenter cet article ou à donner vos impressions sur votre itinéraire à Yosemite ! Et si vous voulez découvrir des photos de nature de meilleure qualité, allez donc faire un tour dans ma section photographies. Vous pourrez commander un tirage grand format de mes clichés, ce qui est une excellente manière de me soutenir ;).